IMPORTANT CABINET DU VAL DE LOIRE D’ÉPOQUE RENAISSANCE

IMPORTANT CABINET DU VAL DE LOIRE D’ÉPOQUE RENAISSANCE

 

ORIGINE : FRANCE, VALLÉE DE LA LOIRE
PÉRIODE : XVIe SIÈCLE, 1570-1580

 

Hauteur : 228 cm
Largeur : 128 cm
Profondeur : 55 cm

 

Bois de noyer
Très bon état de conservation

 

Ancienne collection Gabrielle Chanel

 

 

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Description

Cabinet à deux corps superposés en retrait, ouvrant à quatre vantaux et quatre tiroirs. Il est couronné d’un fronton chantourné qui s’achève en tige végétale.

Ce cabinet est décoré d’incrustations de nacre et d’ivoire à motifs d’arabesques, d’animaux et d’allégories.

Les boutons des tiroirs sont ornés de nacre. Les entrées de serrures sont en ivoire.

 

Le corps inférieur repose sur une plinthe moulurée en large saillie et surélevée par des pieds à section carrée. Il ouvre à deux vantaux dont le décor en incrustation de nacre à motif d’arabesques se développent en symétrie sans toutefois être identique. Des tiges souples et feuillues se déploient sur toute la surface et sont garnies de fruits, de chouettes et d’oiseaux divers. Elles jaillissent d’un mascaron sur lequel se tient une figure féminine.

Sur le vantail de gauche Léda est accompagnée de Zeus qui a adopté la forme d’un cygne.

Sur le vantail de droite, un serpent étreint Cléopâtre et lui mord le sein.

Les façades des deux tiroirs ainsi que les montants portent aussi un décor d’arabesques en nacre incrusté, développé en frises plus étroites. Nous y retrouvons non seulement les chouettes et les oiseaux mais aussi des chiens.

Entre les deux tiroirs un putti ailé joue avec un animal.

 

Le corps supérieur, en retrait, repose sur deux tiroirs à décor d’arabesques et de chiens, encadrés d’oiseaux. 

Les deux vantaux sont flanqués de montants richement décorés où les figures humaines se font beaucoup plus présentes dont notamment une femme tenant un enfant dans ses bras, il s’agit de l’allégorie de la Charité.

Sur le faux-dormant, Vénus tient dans ses mains l’arc de son fils Cupidon.

Chaque vantail présente une composition d’arabesques en trois médaillons superposés. Le médaillon central est occupé par l’allégorie de la Prospérité tenant une corne d’abondance.

Sur le médaillon inférieur du vantail gauche, est délicatement incisé dans la nacre, un portrait de femme à la coiffure soignée et sur le vantail droit un portrait d’homme aux cheveux courts et à la barbe fournie. Leurs armoiries respectives apparaissent sur le médaillon supérieur. 

La surface étirée de l’entablement est prétexte à une scène animée de courses entre chiens, chats et oiseaux, rythmée par trois représentations de nymphes sous la forme de figures féminines allongées.

Le fronton chantourné décoré d’arabesques végétales et d’animaux reprend la composition en trois médaillons développés horizontalement cette fois. Sont incisés, des profils de guerriers casqués sur les plus petits médaillons tandis qu’au centre se tient le dieu Mars, une main sur la hanche l’autre sur sa hampe. Une tige fleurie, découpée et incrustée de nacre, couronne le fronton.

 

Des arabesques en incrustations de nacre décorent également les côtés. Plus aérés et rigoureux dans leur aspect géométrique, ces motifs ornent aussi la tablette du corps inférieur. Un disque de nacre incisé de cercles concentriques fait écho aux boutons des tiroirs.

 

Le système décoratif de ce cabinet révèle un ornementiste de grand talent qui a su mêler naturellement arabesques, répertoire animalier et références mythologiques.

C’est par l’intermédiaire des artistes italiens appelés à la Cour de Fontainebleau par le Roi François Ier (1494-1547) que le motif d’arabesque s’affirme en France.

Son répertoire décoratif est particulièrement adapté à la vogue ornementale développée par l’Ecole de Fontainebleau. Il subit toutefois des mutations locales en abandonnant quelque peu son abstraction botanique – notons la présence de glands sur les arabesques de notre cabinet – et en s’associant avec des animaux et des figures humaines.

Les courbes et les volutes du décor d’arabesques et la silhouette chantournée du fronton sont particulièrement efficaces et adoucissent avec grâce la rigueur architecturale de ce meuble typique de la seconde moitié du XVIe siècle.

La blondeur du noyer, la somptuosité du décor et le luxe des matériaux associent la réalisation de ce cabinet à la Vallée de la Loire et témoignent d’une commande de haut-rang. En effet ce type de meuble était destiné à des commanditaires de prestige. 

Grâce aux armoiries de nacre figurées sur le vantail droit (au lion a la fasce chargée de trois cœur) nous pouvons désigner le commanditaire comme appartenant aux Herissem, une famille noble des anciens Pays-Bas, aujourd’hui en Belgique.

Ce meuble était probablement un cabinet commandé à l’occasion d’un mariage comme tend à le prouver la présence des portraits et des armoiries de deux familles mais aussi la thématique du décor.

La représentation de Léda et le cygne, la scène du suicide de Cléopâtre insistent sur une certaine dimension sensuelle tandis que la représentation de Vénus qui a subtilisé les armes de son fils exprime davantage un amour chaste. L’allégorie de la Prospérité et de la Charité indiquent bien sûr les vertus à cultiver de même que les chiens, symbole de fidélité. Les nombreuses chouettes, attribut de la déesse Minerve, incarnent la sagesse. La présence répétée de figures militaires – Mars, guerriers – s’oppose aux figures de l’amour illustrant ainsi l’équilibre à cultiver dans le couple. 

 

L’éloignement géographique entre le centre de production et le commanditaire met en lumière le prestige dont pouvait jouir le mobilier du Val de Loire de même que la puissance financière et le goût affirmé du couple Herissem. Le programme iconographique fait montre d’une culture classique certaine et éclaire les échanges artistiques singuliers qui caractérisent la Renaissance. Ce cabinet est aussi un exceptionnel témoignage du savoir-faire des ébénistes et des ornementistes de la fin du XVIe siècle.